Posté par Thomas Debesse le 30/05/2017 à 18:31. Licence CC by (copiez-moi !)
Ta souffrance me bouleverse et je comprends qu’un dieu puisse t’aimer.
J’écris le mot de « souffrance » parce que dans mon histoire personnelle, c’est ainsi que j’ai découvert ce mouvement du cœur : une souffrance qui m’a arraché à ma nuit pour prononcer ces mots à quelqu’un : « vis dans ton sang ».
Mais ce mystère est en fait un mystère de vulnérabilité, ce mystère rejoint toute vulnérabilité. Dans l’amitié on découvre et on se découvre des vulnérabilités, et la contemplation de ces vulnérabilités nous emplis d’une grande crainte.
La crainte n’est pas la peur. La crainte, c’est ce mouvement du cœur qui nous retient par exemple lorsqu’on recueille un nouveau né dans ses bras, la crainte c’est ce mouvement du cœur qui nous donne la délicatesse et la douceur qui convient à la fragilité que nous embrassons.
Ainsi se découvre l’amitié, l’amitié révèle dans la confiance nos vulnérabilités, et ces vulnérabilités nous ouvrent à ce mouvement du cœur le plus délicat : la miséricorde. Le propre de l’amitié est de se déshabiller le cœur peu à peu, avec toute la délicatesse que l’autre nous permet. Cet ordre des choses est très important : c’est l’autre qui permet notre propre délicatesse, et qui l’éveille, la suscite, et la révèle en nous.
L’amitié c’est cette disposition du cœur qui nous permet, dans une confiance mutuelle, de baisser nos gardes, et de déployer doucement notre dévoilement. Le jardinier sait qu’il ne peut éclore la fleur, le jardinier laisse la fleur s’éclore par elle-même, car il sait qu’il ne peut la toucher dans ce mystère. Seule la fleur possède en elle-même la délicatesse nécessaire pour défroisser ses pétales sans les déchirer, seule la fleur connaît le temps nécessaire pour se déplier et se révéler sans se blesser. Ainsi le jardinier prend soin de sa rose, il la protège d’abord et lui permet de trouver en elle la confiance dont elle a besoin, mais le plus grand soin du jardinier, c’est le soin qu’il ne fait pas, c’est lorsqu’il se retire, qu’il se tait, qu’il attend le temps que la rose seule connaît.
Il y a des portes que l’on déverrouille, mais que l’on n’ouvre pas, car on invite l’autre à en pousser le battant, de lui-même, de son initiative, mais cette invitation elle-même est silencieuse, car cette invitation est une invitation au désir : l’amitié ne se demande pas, l’amitié ne s’invite pas elle-même, elle se désire, et c’est ce désir qu’il convient d’inviter.
Ainsi, ta vulnérabilité me bouleverse et je comprends qu’un dieu puisse t’aimer. Ces mots sont l’expression d’une amitié qui se penche à travers toi jusqu’à la miséricorde. Tu connais ma fidélité.