Posté par Thomas Debesse le 19/05/2022 à 18:35. Licence CC by (copiez-moi !)
→ regarder sur la chaîne Youtube N’oubliez pas de vivre (Licence CC By)
Sommaire
00:00 Épisode
09:14 Pèlerinage
Transcription
J’ai fait un pèlerinage à Chartres
En 2019 lors du pèlerinage de Pentecôte un autre pèlerin m’a demandé un peu avant d’entrer dans Chartres si c’était la première fois que je faisais ce pèlerinage. Je lui ai répondu que c’était mon vingtième. Il me dit alors qu’il faut bien du courage pour faire vingt pèlerinages. Alors j’ai ajouté, il faut du courage pour faire un pèlerinage, mais pour le faire vingt fois, ce n’est pas du courage qu’il faut, c’est de la fidélité.
Quelques mètres plus tard c’est un prêtre qui m’a posé des questions similaires et auxquelles j’ai donné les mêmes réponses. C’est étonnant que cette discussion ait eu lieu deux fois le même jour, mais qu’il a fallu vingt ans pour qu’elle advienne.
Il faut du courage pour marcher 100 km, il faut du courage pour marcher encore le troisième jour. Mais c’est la fidélité qui fait refaire cela une vingtième fois.
Je crois que c’est un bonne définition de la fidélité.
Pour faire un premier pèlerinage il faut se justifier de le faire, pour donner trois jours de sa vie, pour s’investir autant physiquement, pour se risquer autant spirituellement, il faut le justifier d’une manière ou d’une autre. Pour certains il faut peut-être même poser des jours de congés qu’il faut eux-même justifier. Mais quand on a fait vingt pèlerinages, le même pèlerinage chaque année pendant vingt ans, c’est l’inverse qui se produit : il faudrait se justifier de ne pas le faire. Il faudrait avoir de bonnes raisons, un vraie excuse, un empêchement sérieux pour ne pas le faire.
Et je crois que c’est ça la fidélité : c’est quand il faudrait se justifier de ne pas le faire, quand il faudrait se justifier de ne pas être là, devoir se justifier de ne pas servir, devoir se justifier de ne pas donner, devoir se justifier de ne pas faire l’effort.
Le courage c’est de faire l’effort, de se dépasser, et d’être présent. Être fidèle c’est le devoir de faire l’effort, de se dépasser, et d’être présent.
S’il y a bien quelque chose qui a fortement participé à mon éducation à la fidélité, c’est le pèlerinage de Chartres. Ce n’est pas la seule chose qui m’a éduqué à la fidélité, et il fallait bien que j’ai cette fidélité en germe pour avoir fait le premier pèlerinage, puis le second, jusqu’à mon vingtième.
Quand on est jeune il est important de s’engager dans des mouvements comme le scoutisme, Missio, et d’autres où l’on apprend le service, où l’on apprend à se donner et à se dépasser. Mais on peut apprendre à se dépasser dans l’instant, et ça c’est le courage, ce courage qui permet d’aller jusqu’au bout d’un pèlerinage par exemple. Mais on peut apprendre ce courage sans apprendre la fidélité. On peut passer à côté de la fidélité. On peut chaque année se dépasser dans une nouvelle présence, mais pour la fidélité il faut des années dans la même présence.
Celui qui n’a pas marché vingt ans, chaque année, le même pèlerinage, ne peut pas rattraper cette formation sans y passer vingt ans. Tout les stages les plus intenses, les plus éclairs, les plus denses, ne peuvent remplacer l’expérience de la durée. La fidélité s’apprend dans les saisons. C’est pour ça que j’ai toujours dit à des fiancés qu’il est important de vivre toutes les saisons. Mais surtout la fidélité s’apprend dans les années. Quand deux fiancés se marient ils n’ont en fait pas vraiment eu le temps de s’y former, ils ont le courage de l’engagement, mais la fidélité, il va falloir la découvrir. Et le pèlerinage d’une certaine manière nous offre l’opportunité de nous exercer à la fidélité.
Lorsque j’ai fait mon premier pèlerinage de Chartres, j’avais 13 ans. Les pastouraux n’existaient pas, je l’ai donc fait avec le chapitre adultes. J’avais rejoint la colonne et m’étais accroché à un chapitre un peu au hasard. Je me souviens que les derniers kilomètres à Chartres m’avaient été vraiment difficiles. Je me souviens que des jeunes femmes du chapitre disaient combien il leur était difficile de devoir s’arrêter tout le temps alors que la colonne de pèlerins piétinait dans l’agglomération chartraine. J’étais un peu désolé pour elles, car moi silencieusement, je priais pour que le prochain croisement arrive vite, que le prochain piétinement arrive vite, car j’avais besoin de toutes ces petites pauses pour aller jusqu’au bout. C’est aussi une belle leçon, car c’est dans ces piétinements que j’ai trouvé la force d’aller jusqu’au bout. Et en fait cette difficulté ne m’a jamais quitté, c’est toujours aussi difficile pour moi chaque année et chaque année j’attends le prochain piétinement avec beaucoup d’espoir, et j’investis entièrement ces micro pauses improvisées pour y puiser la force d’aller jusqu’au bout. La fidélité c’est d’être courageux tous les jours.
Et en 2019, j’avais fait cela chaque année pendant vingt ans.
Et quand on l’a fait vingt ans, il ne faut pas se justifier de faire ce pèlerinage, il faut se justifier de ne pas faire ce pèlerinage.
Lorsque j’ai donné ces réponses sur la fidélité en 2019, je ne savais pas ce qui m’attendait en 2020, ce qui nous attendait en 2020. Et l’année 2020 a effectivement testé ma parole jusqu’au bout.
Avec le confinement et les diverses restrictions, le pèlerinage n’a pas pu avoir lieu dans sa forme habituelle. De nombreux petits pèlerinages ont été organisés bien entendu, les chapitres ont été gardés vivants, mais il était impensable pour moi de ne pas tenir cette parole. Il se trouve que providentiellement à la Pentecôte en 2020, j’étais exactement dans la zone de restriction de 100km à la fois de Paris et à la fois de Chartres. Il m’était donc possible d’aller à Notre-Dame de Paris et de marcher jusqu’à Notre-Dame de Chartres, seul s’il le fallait. Je pouvais le faire. Et comme je l’ai dit, la fidélité c’est quand il faut se justifier de ne pas le faire, et d’aucune manière, rien ne m’y empêchait. Alors je suis parti, seul.
À cause de l’incendie de Notre-Dame, le départ de 2019 s’était fait à Saint Sulpice. Mais puisque j’étais seul en 2020, je pouvais partir de Notre-Dame de Paris. Le samedi veille de la Pentecôte je suis donc parti à pied de Notre-Dame de Paris, j’ai fait le détour par Saint Sulpice où l’association Notre-Dame de Chrétienté avait fait célébrer une messe, et j’ai marché trois jours jusqu’à Notre-Dame de Chartres. J’ai été seul les deux premiers jours, et j’ai été accompagné d’un proche le lundi de pentecôte. Avec la messe du dimanche de la Pentecôte je suis parti tard le dimanche et je n’ai pas réussi à rejoindre Gas le dimanche soir donc la journée du lundi a été beaucoup plus longue et je suis arrivé lundi soir à Chartres.
À la fin de ces trois jours, je pouvais dire « J’ai fait un pèlerinage à Chartres », mais en fait ce pèlerinage à Chartres, c’est aussi le fait de marcher une fois, deux fois, ving fois, vingt-deux fois, vingt-trois fois. C’est ça le pèlerinage, il y a des années dans le pèlerinage.
En 2022 le pèlerinage se reforme dans sa forme habituelle, et nous pourons tous marcher ensemble de Paris à Chartres pendant trois jours, pour prier avec nos pieds, [et] avec nos silences. Et j’espère bien que nous serons 10 000.
Cette année sera le quarantième pèlerinage de Pentecôte. Pour faire quarante pèlerinages il faut une certaine fidélité, et ces quarante années sont le témoignage de fidélité du peuple français. Cette année le thème de pèlerinage est : « Sacré-Cœur, Espoir et Salut des nations ». Pour moi ce sera mon vingt-troisième. Ce sera le 4, 5 et 6 juin 2022 et j’y serai, parce qu’il me faudrait me justifier de ne pas venir.
En 2020 mon intention de pèlerinage était la conversion des évêques. Et je m’étais inscrit au chapitre Saint Ursin, un chapitre de Bourges. Donc si vous voulez savoir quel était le meilleur chapitre de France en 2020, eh bien c’était Saint Ursin. Bon, je sais que je ne suis pas le seul à l’avoir fait. À la messe d’action de grâce à Sainte Odile j’ai notamment croisé une Marguerite qui l’a aussi marché en entier en solitaire en 2020, et qui a été plus courageuse que moi car elle a dormis à la belle. Si vous aussi vous l’avez marché en entier en 2020 ou en 2021 n’hésitez pas vous manifester en commentaire.
Je ferai d’ailleurs peut-être une vidéo sur mon pèlerinage de 2021 avec d’autres enseignements mis en lumière par le pèlerinage. N’hésitez pas à vous abonner, à mettre un j’aime et un commentaire et à partager la vidéo pour aider à la visbilité de la vidéo et de la chaîne, Je vous rappelle que j’ai une page Tipeee pour recevoir des dons qui me permettent de consacrer du temps pour réaliser ce genre de vidéo.
Et pour conclure cette vidéo je vous met en accéléré ma marche de 2020. Alors je vous préviens, ça va vite, car avec trois jours de marche résumés en une douzaine de minutes, le paysage défile à la même vitesse que si vous étiez dans la cabine d’un TGV qui traverserait les rues et les forêts.
Note: Le masque sur les photos c’est parce que ce sont des photos que j’avais postées sur les réseaux sociaux pendant ma marche et pour divertir mes abonnés j’avais mis un masque sur les photos (ironie !), je ne suis pas stupide pour marcher 100 km avec un masque (ne le faites pas !) 🤭️